Dans le contexte de la guerre froide des années 50, il est indispensable d’avoir une couverture radar totale et efficace, non seulement, du territoire national, mais aussi des abords des frontières. Ainsi, dès 1952, l’Etat-Major de l’Armée de l’Air prend la décision d’installer des moyens de détection et ce contrôle aux abords de la région lyonnaise. La légende raconte : «qu’un jour le commandant de la base aérienne de Bron reçoit la visite d’un de ses amis qui est Général au Ministère de l’Air à Paris, et ce dernier l’informe qu’il est à la recherche d’un site pour installer une station radar. Le commandant de la base, en fin gourmet, l’invite à déjeuner au restaurant Orsi à Poleymieux au Mont d’Or. A la fin du repas, le ‘chef’ vient saluer ses hôtes et la conversation s’oriente vers la raison de la visite du Général. C’est alors que le restaurateur, Louis Orsi, lui indique la proximité du Mont Verdun et de son fort… »
Ainsi, débutèrent les travaux d’aménagement de cet énorme ouvrage souterrain, mais qui furent ralentis par suite de la réduction des budgets et des événements de la Guerre d’Algérie.
Le 1er juillet 1955, bien qu’ayant renoncé à toutes prérogatives d’utilisation de l’aéroport de Bron à titre opérationnel, l’Armée de l’Air dans l’attente de la mise en service de l’ouvrage de détection et de contrôle du Mont Verdun ouvre à titre provisoire, une station mobile radar sur le site de de la base aérienne 111 de Bron, puis transférée en septembre 1955 à l’est de la piste de l’aéroport (emplacement actuel d’Eurexpo). Il s’agit de la Station Radar Intérimaire (SRI) 10/942, indicatif ‘Corbeau-Radar’, équipée d’un ensemble ‘Type 21’ constitué d’une antenne panoramique donnant l’azimut et la distance et d’une antenne pour l’altitude installée sur de vieux camions de l’armée anglaise. Ultérieurement, un radar américain du type ’ANTPS 1 D’fut ajouté. Le personnel relativement peu nombreux sous les ordres du Capitaine Carret, puis du Commandant Gamba: quelques officiers d’active, des officiers contrôleurs d’opérations du contingent, des sous-officiers d’active spécialistes des transmissions et une dizaine d’hommes du rang qui effectuaient la mission de ‘marqueurs-lecteurs’. La mission de la SRI était la détection dans le volume couvert par les antennes (environ 90 miles nautiques environ 170 kilomètres). Les informations concernant les appareils détectés éraient visualisées sur la table de la salle d’opérations et retransmises au Centre d’Opérations de Zone (COZ) de Mignet à Aix en Provence. La SRI n’était activée que le matin, et ponctuellement sur demande. L’après-midi était réservé à l’instruction et aux travaux de calibration.
Simultanément à l’installation de la SRI à Bron, des travaux de génie civil sont entrepris en bordure de l’aérodrome de Satolas en 1956 en vue de la création d’une station radar militaire. L’entreprise de travaux publics Maïa exécute des travaux de terrassement ; tracés de routes, creusement de trachées pour l’adduction d’eau et pose de câbles électriques. Cet aérodrome situé à dix-sept kilomètres de Lyon est classé terrain de tourisme et son affectataire principal est l’Armée de l’Air. D’une superficie de 72 hectares, cet aérodrome est doté d’une piste en herbe de 700 mètres, orientée nord-sud, qui partage le terrain en deux.
Le 1er juillet 1957, l’activité opérationnelle de la SRI 10/942 de Bron est transférée sur l’aérodrome de Satolas et prend le nom de Commandement et Centre d’Opérations de Base de Défense Aérienne 10/942 (CCOBDA 10/942). En 1960, la station devient Centre de Contrôle et de Détection 20/942, puis en 1961, Centre de Détection et de Contrôle 05/942 (CDC 05/942).
Sur le terrain, les installations sont composées de quatre ilots:
à l’est, l’îlot OPS: zone opérationnelle avec salle d’opérations et les installations-vie pour les personnels. En 1960, la salle d’opérations prit le nom de ‘Salle d’Opérations Capitaine Ginioux’, en mémoire d’un pilote de chasse qui avait été affecté à la station pour assurer un commandement et qui trouva la mort en service aérien commandé sur T 33.
au nord-ouest, l’îlot n° 1, deux antennes radar de ‘veille-combinée’ (deux antennes panoramiques et deux antennes de site pour l’altitude) de type AN 104 C de la Société Nouvelle d’Electronique.
au nord-est du terrain, l’îlot n°2, deux antennes de site de type AN 7B de la Compagnie Française Thomspn-Houston.
au sud-ouest, l’îlot n°3, proche du hangar de l’aéro-club, site réservé aux installations radio VHF, UHE et bâtiments techniques.
Vue aérienne des ilots (Coll CALM – Paul Mathevet)
Chaque îlot est ceinturé d’une double rangée de haut grillage et d’un chemin de ronde. L’îlot OPS qui est le plus important en surface est doté d’une baraque du type ‘Fillod’ dans lequel au début de la base se trouve : le poste de garde, les bureaux du commandant de la base, du secrétariat, le bureau des opérations, et une chambre à destination de dortoir pour les permanents, de mess, etc…Une autre baraque ‘Fillod’ construite au centre de l’îlot abritera la salle d’Ops dans l’attente d’un bâtiment définitif en 1958. Cette baraque sera reconvertie en vue d’accueillir un mess. Chaque matin, les personnels de service arrivaient en cars militaires depuis la base aérienne de Bron. Au début du fonctionnement de la base, les activités opérationnelles n’étaient pas permanentes. Elles le furent à partir de novembre 1961. Elles cessaient après les heures ouvrables sauf ordre contraire pour des opérations ponctuelles ou des exercices. La nuit, une petite équipe de contrôleurs et de techniciens restaient sur le site pour une activation éventuelle de la salle d’opérations. Ces activations étaient parfois nécessaires pour le suivi ou le guidage d’un appareil en difficulté, ou la surveillance de vols particuliers. Du vendredi soir au lundi matin, cette petite équipe restait sur place. L’hébergement était particulièrement précaire : quelques lits superposés dans la baraque ‘Fillod’, et sous la tente parfois l’été. La buvette ‘Le tonneau à facettes’ du Père Comby située toute proche des installations était le refuge pour trouver un peu de chaleur l’hiver ou un repas chaud. En 1963, époque où la station avait atteint son ‘rythme de croisière’, les effectifs étaient les suivants : 25 officiers, 135/140 sous-officiers (contrôleurs, opérateurs et techniciens), 150 hommes de troupe et 40 personnels administratifs. Au Commandant Gamba, succédèrent : les Commandants Lefol, Cimetière, Jackson, Sarah en 1963, Nivellet, Oléo, Luciani en 1965, Bretagnon en 1968, Durupt en 1970 et le Colonel Azimont lors du transfert du Centre au Mont Verdun.
Entre 30.00 et 40.000 avions étaient annuellement détectés et identifiés, 13.000 à 14.000 avions militaires français ou alliés étaient suivis ou guidés radar chaque année par le Centre. La cellule guidage des avions de combat était particulièrement active : 1.900 à 2.000 missions étaient effectuées en moyenne.
En 1960, l’indicatif du Centre qui était auparavant ‘Corbeau’ fut modifié. Beaucoup de pilotes militaires étrangers confondaient ’Corbeau’ et ‘Calva’ qui était l’indicatif de la station de Romilly sur Seine. Le nouvel indicatif choisi fut ‘Rambert’.
Par ailleurs, en 1963, un radar primaire civil pour le contrôle aérien ‘en route’ de la région sud-est est installé à l’ouest des installations militaires, au nord du hangar de l’aéro-club. Il est synchronisé en rotation avec le radar militaire, pour éviter les interférences. Il est complété, plus tard, par un radar secondaire co-implanté. Ces données radar sont envoyées à la salle d’approche de la tour de Bron et au Centre de Contrôle Régional Sud-Est à Aix en Provence ainsi qu’aux militaires.
Dès 1969, débutent sur l’aérodrome de Satolas des travaux de génie civil en vue de l’implantation de l’aéroport de Lyon-Satolas.
Le 5 novembre 1973, le nouveau ‘Centre de Détection et de Contrôle 05/942’ est opérationnel au Mont Verdun. Le 14 novembre 1974, la base-vie du Mont Verdun est officiellement inaugurée.
Les installations du Centre de Détection et de Contrôle 05/942 furent détruites pour faire place à l’aéroport international de Lyon-Satolas.
Une anecdote: ‘Le jour où j’ai foutu en l’air la couverture radar du Sud-Est’
http://iconesetclash.blogspot.com/2008/09/le-jour-ou-j-foutu-plat-la-couverture.html
Fête de la Saint GABRIEL, patron des télécommunication et radio ; station radar militaire Satolas en 1974 (Coll CALM – Paul Mathevet)
Vue de l’îlot OPS de la station radar de Satolas (Coll CALM – Paul Mathevet)
Vue de l’îlot Radar Satolas 1964 (Coll CALM – Paul Mathevet)
Opérateur radar à son poste (Coll CALM – Paul Mathevet)
De la SRI au CDC de Satolas © CALM 07/2022