Les aérogares de l’aéroport de LYON – BRON, au fil du temps… 1/2

Les aérogares de l’aéroport de LYON – BRON, au fil du temps… 1/2

Paul Mathevet (membre 2A) et le cercle aéronautique Louis Mouillard

 

L’inauguration officielle du terrain d’aviation de Bron a lieu les 12 et 13 novembre 1910, à l’initiative de l’Ecole Nationale d’Aviation. A l’origine, l’emprise aéronautique se situe sur la commune de Bron. Ce terrain se situe dans une vaste plaine à une dizaine de kilomètres à l’est de Lyon en bordure de la route nationale reliant Lyon à Grenoble et Chambéry.

En mars 1920, le terrain d’aviation militaire de Bron est ouvert à la circulation aérienne. Le Service de la Navigation Aérienne aménage la halte aérienne. De nouvelles acquisitions foncières sont réalisées sur la commune de Chassieu afin de développer l’infrastructure aéroportuaire.

C’est le lundi 25 mai 1926, que la Compagnie Air Union ouvre l’exploitation de la ligne Paris-Lyon-Marseille, sans changement d’équipage et d’avion à l’escale de Bron.

C’est au Journal Officiel du 23 novembre 1929 que paraît le décret accordant à la Chambre de Commerce de Lyon la toute première concession d’un aérodrome en France. Le principal but de la Chambre de Commerce est de réaliser une aérogare symbolisant la fonction commerciale de l’aéroport de Bron.

 

De l’aérogare la plus moderne du monde en 1930 à Lyon – Bron

Le Plan Duval précise sa conception de la future aérogare : « Si on place la gare aérienne en un point voisin du centre du terrain et que, de ce sommet, on trace un angle de faible ouverture, on voit que, quelle que soit la direction du vent, les envols et et atterrissages pourront se faire selon un diamètre ou plus exactement sur une parallèle à un diamètre pratiquement aussi longue et aussi favorable. Dès lors, tout angle mort, inutile pour la circulation aérienne, peut être occupé par les constructions nécessaires, et au besoin les agrandissements pourront se continuer par le prolongement du secteur en dehors du cercle. »

La forme du terrain de Bron permet l’application de cette conception appelée «Plan Duval», et la Chambre de Commerce de Lyon obtient des autorités les facilités pour établir l’aérogare au sommet d’un angle saillant, à la limite des installations aéronautiques militaires et marchandes, au sud du terrain. Une somme de 500.000 francs (1 franc de l’année 1930 vaudrait 55 centimes d’euros en 2011) est allouée par la Chambre de commerce de Lyon pour l’achat de terrains se situant sur la commune de Bron, et tout particulièrement sur celle de Chassieu. Un hangar qui abrite des appareils civils à l’est du bâtiment de la Direction, ainsi que le grand hangar en bois de l’aviation militaire sont démontés. Le recul des limites des départements du Rhône et de l’Isère est envisagé afin d’inclure entièrement l’aéroport dans un même département.

Les travaux de construction de l’aérogare commencent en juin 1929. Ces travaux sont estimés à 3.000.000 de francs, et sont attribués aux entreprises suivantes :

  • Gros oeuvre de l’aérogare (terrassement, maçonnerie et ciment armé) : établissements Perol de Lyon pour un devis de 790.000 francs;
  • Sols en carrelage de grès : société Mezil pour 88.000 francs;
  • Serrurerie et autres quincailleries : société Coudant pour 14.200 francs;
  • Peinture et plâtrerie : société Boretti pour 188.000 francs;
  • Menuiserie : entreprise Abbé Lamache pour 41.000 francs et entreprise Grimonet pour 118.000 francs;
  • Ascenseurs : société Gervais;
  • Monte-charge : société Roux-Combaluzier;
  • Messieurs Antonin Chomel et Pierre Verrier, architectes, assurent le suivi des travaux.

La presse de l’époque titre :

« La plus grande aérogare du monde est inaugurée à Bron. »

« L’inauguration officielle a lieu le dimanche 14 décembre 1930 en présence de Emmanuel Chaumié, Directeur de l’Aviation Marchande au Ministère de l’Air, accompagné de Charles-Marie Duval, inventeur du plan d’équipement technique des bases aériennes, Edouard Herriot, Maire de Lyon, accompagné du Préfet du Rhône Valette, de Louis Pradel, Président de la Chambre de Commerce et de Georges Tresca, Président de la Commission Aviation à la Chambre de Commerce, de J. Ruty, Directeur de l’aéroport.»     

Ce bel événement, dont tout le monde se félicite alors, a pourtant eu du mal à s’organiser. On apprend, en effet, par le procès-verbal de réunion de la Chambre de Commerce du 27 novembre 1930, qu’il ne pourra avoir lieu à cause de la catastrophe survenue le 13 novembre au quartier Saint Jean de Lyon (éboulement de la colline de Fourvière). Le ministre de l’Air, immédiatement prévenu, fait connaître que la date du 14 décembre lui convient et qu’il accepte l’invitation pour ce jour-là.

Deuxième rebondissement : Lors de la réunion de la Chambre de Commerce du 11 décembre, le Président de la Chambre de Commerce annonce qu’après avoir examiné la situation que la chute du ministère a créée, pense que la date de l’inauguration doit être conservée. Il est d’avis d’attendre quelques jours pour voir comment évolueront les événements, et de faire inaugurer par Monsieur Couhé, Secrétaire Général du Ministère de l’Air, au cas où la crise ministérielle ne serait pas dénouée…

Toutefois, pour des raisons de sécurité et de conformité, la mise en service au public n’intervient que le 8 février 1932. En effet, les procès-verbaux d’essais du bâtiment font apparaître qu’en un point du bâtiment, accessible au public, les flèches enregistrées sous les charges d’épreuve ont été supérieures au maximum fixé par le Cahier des Charges (5,4 au lieu de 3,12 mm). Le Ministre de l’Air n’a pas autorisé la mise en service de ce bâtiment immédiatement après l’inauguration.

Plan du rez-de-chaussée du Port aérien de Lyon – Bron, tel que l’avaient conçu les architectes Chomel et Verrier (Coll. Encyclopédie de l’Architecture, Constructions modernes)

L’aérogare, en forme de deux branches en «V», de ligne sobre, peinte en blanc sur lequel se détachent des bandes rouges horizontales, se développe sur plusieurs niveaux, avec terrasses. Les fondations de l’aérogare sont assisses sur du gravier, dont l’extraction a permis l’installation de vastes sous-sol accessibles par des rampes, où sont placées les installations de chauffage, des cuisines, des dépendances et un garage pour les voitures de service.

Au rez de chaussée : un vaste hall de départ et d’arrivée en forme de rotonde. La décoration de son pourtour est faite de fresques murales, œuvres du maître-décorateur lyonnais Combet-Descombes, représentant des cartes géographiques avec les différentes lignes aériennes. Une particularité  de ce hall réside dans son éclairage zénithal. En effet, la coupole qui le surplombe a été réalisée en béton armé dans lequel sont noyés des pavés de verre laissant filtrer la lumière du jour.

C’est dans ce hall que sont installés les comptoirs des compagnies aériennes pour la vente des billets, l’enregistrement des bagages, une boutique de presse et de souvenirs, ainsi qu’un débit de tabac. Dans ce hall, se situent deux accès situés sur la gauche : l’un conduit vers la salle d’attente, et l’autre au buffet (avec des menus à 18, 25 et 35 francs). Ce dernier s’ouvre sur l’extérieur par une vaste terrasse.

Photo aérienne du Port aérien de Lyon – Bron, avec en arrière-plan la construction du hangar Caquot

L’aile droite du rez de chaussée aux divers services en contact avec les passagers et les messageries : bureau de poste, de la police, de la douane, et une petite gare de marchandises avec quai à hauteur des camions et monte-charge pour le magasinage du fret. Des auvents protègent des intempéries toute la partie extérieure des manipulations. Les voyageurs sont informés des mouvements des appareils, soit par haut-parleur, soit par un panneau lumineux. Lors de son départ, le passager s’achemine vers l’aire d’embarquement par une allée couverte. L’appareil prend place sur l’aire d’embarquement, réalisée en béton armé, avec une légère pente afin d’éviter que les eaux de pluie stagnent.

  • Au premier niveau, prennent place les bureaux administratifs du port aérien et des compagnies aériennes, de la direction de la météorologie et ce la radio, ainsi que quelques chambres pour les passagers et le personnel navigant de passage.
  • Au deuxième niveau, se trouvent les services de la direction de l’aérogare, et plus particulièrement le bureau du directeur situé dans une avancée vitrée qui lui permet de tout voir, tout surveiller et tout diriger…
  • Au troisième niveau, à 16 mètres au-dessus du sol, une tour de guet se dresse, d’où est commandé électriquement le balisage de nuit, différents signaux lumineux dont le phare aérien.

Ces divers étages sont dotés de terrasses, accessibles au public à partir d’escaliers extérieurs, permettant ainsi de voir évoluer les appareils, ainsi que les opérations  d’arrivées et  de départs. Un droit d’entrée de 1 franc par personne, sauf pour les enfants, est perçu le samedi et dimanche, l’après-midi.

Dans la construction de ce bâtiment, les innovations techniques dues aux architectes et aux ingénieurs sont relativement nombreuses : dalle de béton avec pavés de verre dans les terrasses, utilisation de joints de dilatation, cloisons en fibre de canne à sucre desséchée ou en copeaux de bois agglomérés, circuit de chauffage à air chaud, tube pneumatique pour la transmission des messages à l’intérieur des services, nombreux circuits électriques et téléphoniques, réseaux d’eau chaude et froide installés à l’intérieur de piliers creux, etc…

Le hall de l’aérogare avec les fresques de Pierre Combet-Descombes

 

Vue de l’entrée de l’aérogare

 

Sources

  • Extraits de l’ouvrage «Cinquante ans d’aviation commerciale sur l’aéroport de Lyon-Bron» de Paul Mathevet aux Editions ELAH, avec la collaboration de Monsieur Philippe Treillet, ancien Directeur de l’Exploitation de l’Aéroport de Lyon-Bron.
  • Photos, Collection privée et Philippe Treillet.