Station aérienne de BORDEAUX - TEYNAC (Gironde) | ||||||
Tandis qu'une initiative individuelle des tout débuts de l'aviation avait abouti à la création du terrain de Beaudésert à 4 km à l'ouest de l'agglomération bordelaise, l'Aéro-club du Sud-Ouest et celui des Pyrénées s'unirent en décembre 1908 au sein d'une "Ligue méridionale aérienne" pour aménager un immense aérodrome, au sens qu'eut quelque temps ce mot à l'époque. Les deux aéro-clubs avaient jeté leur dévolu sur un vaste espace déboisé situé à une vingtaine de kilomètres au sud-ouest de Bordeaux et desservi par la gare de Croix-d'Hins de la même manière et avec le même avantage que, près de Paris, Port-Aviation l'était par celle de Juvisy. La différence était toutefois que les aviateurs allaient pouvoir ici "faire des vols en ligne droite de 5 ou 6 km à 4 m de terre" ou "essayer leurs machines sans le moindre danger sur un circuit de 15 km". Outre l'aménagement du sol "en une immense pelouse avec plates-formes de roulement et pistes de lancement", les promoteurs projetaient d'y faire construire des hangars-garages et des ateliers de réparation. Ils envisageaient également d'y provoquer "l'établissement d'un laboratoire d'aérodynamique et d'une station aérologique". Malgré tous ces avantages, le site (hachuré en violet sur la première des deux cartes) fut rapidement délaissé pour celui de Beaudésert, plus modeste mais plus proche de Bordeaux. Privé par la guerre de tout reste d'activité aéronautique, le site de Croix-d'Hins reprit du service en 1917 pour devenir le lieu d'implantation de la station radiotélégraphique La Fayette qui reliait les deux rives opposées de l'océan Atlantique. La proximité de la ville l'emportant sur l'ambition de ce second projet, le succès de Beaudésert éclipsa rapidement celui de Croix-d'Hins. Les deux sites n'en furent pas moins définitivement remis à égalité lorsque la guerre mit fin à leur activité aéronautique. Les ateliers de construction des avions SPAD s’étant installés à Bordeaux en 1915, l’acheminement sur le front de leur production conduisit en 1917 le ministre de la Guerre à acquérir, afin d’y aménager un camp d’aviation, près de 60 ha pris en grande partie sur le domaine de Teynac, à proximité immédiate de celui de Beaudésert, sur lequel s'était déjà établie une base sanitaire de transit américaine. Cette acquisition constitue l'amorce de ce qui à partir de 1920 constituera la station aérienne de Bordeaux - Teynac, qui se développera jusqu'à devenir l'actuel aérodrome mixte de Bordeaux - Mérignac. Mis à la fin des hostilités à l’inventaire initial du service de la Navigation aérienne (S.N.Aé), les 70 ha (aplat bleu sur la deuxième carte) acquis par le ministre de la Guerre en 1917 étaient insuffisants pour constituer la station aérienne projetée dans le cadre du Plan Saconney. La surface du terrain connut donc dès 1920 une extension vers l'ouest de 34 ha (hachurée en bleu). C'est à cette époque que, de même qu'à Orly, Angers, Clermont-Ferrand et Orléans, fut créé à Teynac l'un des cinq centres d’entraînement des pilotes civils mobilisables. La chambre de commerce de Bordeaux ayant demandé en 1928 que l'exploitation de l’aérodrome lui soit donnée en concession, elle fut encouragée, avant même que celle-ci lui soit accordée par décret du 10 juin 1931, à se substituer à l’État pour acquérir 60 ha bordant au sud l’emprise antérieurement constituée. L’État s’étant dans le même temps rendu propriétaire de 64 ha prolongeant également au sud ceux précédemment acquis, c’est sur la base d’une emprise existante de 228 ha que fut conclue pour cinquante années la concession (l'ensemble de ces deux extensions est hachuré en bleu et orange sur le plan). Anticipant également sur cette dévolution, la conception de l'aéroport de Bordeaux fut dès 1929 confiée par la chambre de commerce à l'architecte Cyprien Alfred-Duprat. Ainsi un premier hangar de 6 000 m2 put-il être édifié en 1932 en même temps qu'étaient tracées les premières routes de service de l'aéroport. En octobre 1934 fut posée la première pierre de l'aérogare de Bordeaux, dont la construction sera achevée en début d'année 1936. Entre temps, au cours de l'année 1935, put être livré un second hangar semblable à celui édifié en 1932. Le ministre de l’Air ayant décidé d’installer deux escadres militaires au sud du port aérien peu avant que n’interviennent les décrets-loisdu 30 octobre 1935, l’acquisition de 111 ha sera soumise à expropriation pour cause d’utilité publique, elle-même déclarée par décret du 18 juillet 1935. La chambre de commerce ayant été subrogée dans les droits ainsi conférés à l’État, la surface d’emprise de l’aérodrome fut portée à l’époque par ses soins à 340 ha. Le service des Ponts-et-Chaussées reçut parallèlement mission du ministre de l’Air d’entamer avec l'administration des Domaines l’acquisition complémentaire de 28 ha destinés à recevoir un stand de tir, un dépôt d’essence, un mess officiers et un casernement pour sous-officiers (un aplat orangé couvre sur le plan l'ensemble de ces deux extensions). Devenue ainsi aérodrome mixte civil et militaire, la plate-forme aéronautique de Bordeaux - Teynac était également utilisée par la construction aéronautique, laquelle avait d'ailleurs été à l'origine de sa création. C'est ainsi que derrière la société Dyle et Bacalan, présente depuis 1924, la Société aérienne bordelaise s'installa sur l'aérodrome au tout début des années trente et y occupa les deux hangars de 6 000 m2 édifiés par la chambre de commerce de part et d'autre de l'emplacement réservé à l'aérogare. En 1934, vint enfin Marcel Bloch-Dassault qui, après avoir pris le contrôle de la Société aérienne bordelaise se verra, après les nationalisations de 1936, confier la direction de la S.N.C.A.S.O. En novembre 1936, la partie civile de l’aérodrome prit définitivement l’appellation de Port aérien de Bordeaux - Mérignac. Quelques mois auparavant, la station radiogoniométrique principale de Biarritz avait été comme initialement prévu remplacée par celle de Bordeaux. Un secteur d’atterrissage par mauvaise visibilité (80) de deux fois 10° fut, dans ce cadre, institué en zone d’approche de part et d’autre d’un axe de descente sensiblement orienté N-E / S-O qui correspond à celui de l’une des deux pistes actuelles. Un plan d’établissement des servitudes protégeait ce secteur, tout comme celui de même ouverture qui encadrait l’axe d'orientation E-S-E / O-N-O conservé par la seconde piste. En 1938 enfin, le ministre de l’Air décida la création selon ces deux axes privilégiés de quatre bandes de recueil destinées à "permettre à un avion en difficulté de se poser en dehors du terrain sans risque pour le personnel et le matériel". L’extrême urgence attachée à la réalisation de ce projet conduisit le ministre de l'Air à choisir d’acquérir les 54 ha concernés (hachurés en orange sur le plan) en faisant une nouvelle fois appel aux décrets-lois du 30 octobre 1935. Tandis que le ministère de l’Air s’était très engagé à Biscarrosse pour les vols transatlantiques en hydravion, la Compagnie Air France Transatlantique avait demandé que des pistes"cimentées" soient aménagées à Bordeaux - Mérignac afin d’en faire partir les avions avec lesquels elle envisageait de faire des essais de traversée parallèlement à celles effectuées par "hydros". Plaidait également en faveur de cette demande le fait, très pénalisant pour les avions lourds, que la portance du terrain de Mérignac était restée sensible à l'humidité en dépit des travaux de drainage et d'assainissement qui y avaient été réalisés. Une première piste de 1 300 m x 60 m orientée selon l’axe E-S-E / O-N-O et 3 000 m de voies de circulation de 12 m de largeur desservant les zones civile et militaire furent ainsi réalisés en 1939. Une seconde piste de 1500 m fut mise en construction fin 1939 selon l’orientation N-E / S-O. Militarisé au début des hostilités, l’aérodrome échappa naturellement à la gestion de la chambre de commerce. Destination de repli au moment de la débâcle de juin 1940, il fut occupé par l’armée allemande dès le mois suivant. Celle-ci acheva de réaliser la seconde piste de 1500 m et aménagea un vaste réseau de dispersion allant au delà des limites de l’emprise de l’aérodrome. Gravement endommagé par les bombardements alliés de mars 1943 et d’août 1944, l’aérodrome fut, pour ce qu'il en restait, rendu totalement inutilisable par les Allemands à leur départ en fin août 1944. Les autorités militaires françaises, ayant aussitôt pris possession des lieux, autorisèrent la chambre de commerce à entreprendre immédiatement les travaux permettant la remise en service des infrastructures. Ainsi les avions de tous tonnages de l'époque purent-ils dès la mi-septembre fréquenter l'aérodrome. Félicitée pour cette initiative par le ministre de l'Air, la chambre de commerce se vit, par courrier du même jour, notifier par ledit ministre sa décision de confier désormais directement aux services de la direction des Transports aériens la gestion de l'aérodrome. Faute pour le décret de concession de juin 1931 de pouvoir être purement et simplement abrogé, la mise en œuvre de cette décision instaurera pour longtemps un pilotage au gré des événements de la répartition des rôles sur l'aéroport.
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